Bail commercial : changement d'activité d'un local
L'activité exercée dans un local commercial doit être expressément indiquée dans le bail : le locataire doit utiliser le local uniquement pour exercer l'activité qui y est mentionnée. Plusieurs procédures dites de déspécialisation sont prévues selon que le locataire souhaite changer d'activité, la compléter par une autre activité, ou partir à la retraite.
Déspécialisation partielle ou restreinte
Elle correspond à la mise en place d'une activité complémentaire à l'activité déjà en exercice (par exemple, la vente de plats cuisinés est considérée comme connexe à l'activité de charcuterie).
Le locataire doit, avant tout changement d'activité, notifier son nouveau projet au bailleur par acte d'huissier.
Le propriétaire a 2 mois pour répondre. L'absence de réponse vaut acceptation.
Il peut refuser uniquement dans le cas où la nouvelle activité n'est pas connexe ou complémentaire à celle indiquée lors de la conclusion du bail.
En cas de refus du propriétaire, le locataire peut engager un recours, obligatoirement par l'intermédiaire d'un avocat. Il n'existe aucun délai pour saisir le tribunal de grande instance (TGI). Le juge a un large pouvoir d'appréciation : si l'activité lui paraît connexe ou complémentaire, il peut autoriser le locataire à l'exercer ; dans le cas contraire, il peut rejeter sa demande.
En cours de procédure, le locataire peut toujours renoncer à sa demande de déspécialisation. Il peut le faire à tout moment et jusqu'à l'expiration d'un délai de 15 jours à partir de la date à laquelle la décision est devenue définitive. Il doit dans ce cas le notifier au bailleur par acte d'huissier et supporter tous les frais d'instance.
Déspécialisation totale ou plénière
Elle consiste en un changement total d'activité exercée dans les locaux loués, sans lien avec celle déjà exercée.
Pour prétendre à une déspécialisation totale, le locataire doit :
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être dans la nécessité économique de changer d'activité (rentabilité insuffisante par exemple). Le changement d'activité doit être nécessaire pour que l'exploitation soit rentable et doit apporter au consommateur un service dont il ne bénéficiait pas ou pas suffisamment.
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mettre en place une activité compatible avec la destination, les caractères et la situation de l'immeuble (ne pas entraîner de nuisances pour le voisinage par exemple).
Avant tout changement d'activité, le locataire doit demander, par acte d'huissier, à son bailleur et aux créanciers inscrits sur le fonds de commerce, l'autorisation d'exercer une activité différente de celle prévue dans le contrat de bail.
Le bailleur doit informer dans le mois ses autres locataires envers qui il s'est engagé à ne pas avoir une activité identique à celle qui va être exercée.
Le bailleur a 3 mois pour répondre. L'absence de réponse vaut acceptation.
Il peut s'opposer au changement d'activité en cas de :
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motif grave et légitime,
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intérêt personnel, droits concurrents à des tiers,
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en exerçant son droit de reprise (non-renouvellement de bail, travaux de rénovation urbaine).
Indemnité et incidence sur le loyer
Le changement d'activité peut entraîner le paiement d'une indemnité dite de « déspécialisation » au bailleur pour compenser un préjudice dont il peut justifier l'existence : par exemple, diminution des loyers des autres locataires en raison des troubles de jouissance occasionnés par la nouvelle activité, accroissement des charges, etc.
Le bailleur ayant accepté la déspécialisation peut aussi, en contrepartie de l'avantage procuré, solliciter la modification du prix du bail.
Attention : en cas de changement d'utilisation du local professionnel, le propriétaire doit effectuer une déclaration pour une révision de sa valeur locative auprès des services des impôts.
Cession de déspécialisation (départ en retraite)
En cas de départ à la retraite (ou d'invalidité), le locataire peut céder le bail avec changement d'activité.
La nouvelle activité doit être compatible avec la destination et les caractéristiques de l'immeuble.
Le locataire doit informer son bailleur et ses créanciers de la nature de la future activité et du prix de la cession.
Le bailleur peut :
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accepter le changement,
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racheter le bail dans un délai de 2 mois.
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saisir le tribunal de grande instance dans un délai de 2 mois pour refus de changement.